Le programme de mentorat pour la réussite des élèves autochtones

Qu’est-ce que le programme de mentorat pour les élèves autochtones? Est-ce que tous les conseils scolaires ont ce programme? En quoi ce programme appuie-t-il la réussite des élèves autochtones?


Introduction

Stratégie d’éducation autochtone de l’Ontario

La Stratégie d’éducation autochtone de l’Ontario établit les bases qui permettront d’améliorer le rendement des élèves autochtones fréquentant les écoles financées par les fonds publics de la province. La stratégie favorise un apprentissage continu qui commence dès la petite enfance et qui se poursuit pendant les études postsecondaires, puis avec les occasions de formation et d’apprentissage en milieu de travail.


Un élément clé de la Stratégie d’éducation autochtone de l’Ontario est le Cadre d’élaboration des politiques de l’Ontario en éducation des Premières nations, des Métis et des Inuit. Le Cadre intègre de nombreuses initiatives pour appuyer la réussite des élèves autochtones et le rapprochement des communautés autochtones, dont la mise en place d’une ou d’un leader en éducation autochtone, la mise sur pied d’un Conseil consultatif de l’éducation autochtone (CCEA) dans chaque conseil scolaire, l’accroissement des partenariats avec les communautés autochtones ainsi que la facilitation et l’encouragement de l’auto-identification volontaire et confidentielle des élèves autochtones.

Grâce à ces initiatives et à la Stratégie d’éducation autochtone de l’Ontario, des projets pilotes ont vu le jour. C’est donc dans ce contexte et avec l’appui du ministère de l’Éducation de l’Ontario et des conseils scolaires participants que le projet de mentorat des élèves autochtones a été conçu.


Le programme de mentorat pour la réussite scolaire des élèves autochtones

Le programme vise à appuyer la réussite des élèves autochtones en leur offrant un mentor qui les accompagnera jusqu’à l’obtention de leur diplôme d’études secondaires et qui facilitera leur accès au monde du travail, à un programme de formation ou aux études postsecondaires.

Bien qu’il y ait eu des progrès notables sur le plan de la réussite scolaire, un écart subsiste entre les élèves autochtones et l’ensemble des élèves, notamment dans les taux d’obtention de diplôme. Le Programme de mentorat pour la réussite des élèves autochtones aide les élèves autochtones à obtenir un diplôme d’études secondaires de l’Ontario. Ce programme vise également à soutenir ces élèves dans leur passage d’une école financée par l’État fédéral ou administrée par une Première Nation à une école secondaire financée par la province et dans leur passage aux études postsecondaires, à une formation ou sur le marché du travail. Source : Conseil scolaire catholique Franco-Nord, document Éducation autochtone, Annexe E


Deux conseils scolaires francophones ont été choisis pour participer au projet pilote du programme de mentorat pour la réussite des élèves autochtones, le Conseil scolaire catholique Franco-Nord et le Conseil scolaire public du Nord-Est de l’Ontario.


Le mentor, la pièce maîtresse

Dans les deux conseils, le choix du mentor s’est arrêté sur une personne qui avait les qualités nécessaires pour approcher les élèves, mériter leur confiance et les accompagner. Les mentors s’accordent pour dire que l’empathie, l’écoute active, l’ouverture d’esprit, la patience et la polyvalence sont certains des attributs qui leur permettent d’appuyer les élèves autochtones dans leur réussite scolaire.

« Il faut de l’empathie… être là, ne pas être menaçant. Je suis là pour t’écouter pour voir comment je peux t’aider. Moi, ce n’est jamais ce que tu peux faire pour moi, c’est ce que je peux faire pour toi. » Michel Perron, mentor, Conseil scolaire catholique Franco-Nord

« L’ouverture d’esprit est essentielle. Il faut comprendre qu’il y a des différences. Les élèves autochtones fonctionnent parfois différemment. Leur perspective peut être différente. » Marc-André Dubosq, mentor, Conseil scolaire public du Nord-Est de l’Ontario

Les deux conseils ont choisi des mentors avec des parcours différents. Dans l’un, un enseignant a été libéré de la moitié de sa tâche; dans l’autre, une personne avec beaucoup d’expérience communautaire a été choisie. Cependant, ils avaient tous deux une vaste expérience de vie dans certains domaines tels l’agriculture, la mécanique, la construction, la lutherie et le travail dans les communautés francophones ou autochtones. Avec cette expérience, ils approchaient les élèves selon leurs champs d’intérêt.

La flexibilité et la disponibilité étaient aussi des atouts importants. Cela permettait aux mentors de rencontrer les élèves selon leurs horaires et dans diverses circonstances. Parfois, la rencontre avait lieu en soirée, parfois dans un centre communautaire autochtone et parfois dans la lutherie du mentor. Ces atouts favorisaient l’accompagnement de certains élèves lors de visites dans des établissements postsecondaires.


Le profil de l’élève mentoré

Selon les consignes du projet, seuls les élèves autochtones auto-identifiés pouvaient participer au programme de mentorat. Ces élèves avaient divers profils. Des élèves recevaient déjà l’appui de l’enseignante ou de l’enseignant responsable de la réussite des élèves (ERRÉ). D’autres étaient régulièrement absentes et absents ou avaient déjà abandonné leurs études. Des élèves voulaient obtenir leur diplôme et poursuivre leurs études postsecondaires, mais il leur manquait plusieurs crédits.

Des élèves vivaient dans des communautés autochtones, tandis que d’autres vivaient ailleurs. Certaines et certains élèves avaient des parents et une famille, tandis que d’autres vivaient par elles-mêmes et eux-mêmes ou avec des amis.

Des élèves connaissaient la culture autochtone, tandis que d’autres cherchaient à découvrir leurs racines.

La très grande majorité des élèves qui ont bénéficié du programme sont des garçons, voire de jeunes hommes.


Les premières démarches

Dans les écoles, la façon de sélectionner les élèves qui pouvaient bénéficier du programme de mentorat variait. Dans le cas où le mentor était un membre de la communauté francophone, la direction (avec l’appui des enseignantes et des enseignants et de l’équipe de la réussite) déterminait les élèves qui avaient le profil recherché. Le mentor-enseignant, de son côté, travaillant dans une petite école secondaire, connaissait la majorité des élèves. Souvent, les élèves l’approchaient pour participer au programme.

Suivant la sélection initiale d’élèves, le mentor, accompagné de la direction, rencontre chaque élève pour leur présenter le programme. La majorité des élèves veulent s’inscrire. Il faut alors communiquer avec les parents ou les tutrices ou tuteurs.

Lorsque toutes les parties sont consentantes, l’élève est inscrite ou inscrit au programme de mentorat.


L’approche holistique

Même si la visée du programme est la réussite scolaire de l’élève, l’approche est obligatoirement holistique, car la réussite scolaire passe par le bien-être. Le bien-être, c’est la sécurité, le sentiment d’appartenance et les besoins primaires.

Voilà donc pourquoi les écoles qui participaient aux programmes offraient aux élèves mentorés de participer au programme de déjeuner et, dans certains cas, au programme de dîner. Ces programmes sont subventionnés par des organismes communautaires comme la Croix rouge et le Indian Friendship Centre local. Parfois, c’était une épicerie locale qui fournissait gratuitement des denrées alimentaires. Dans une des écoles participantes, le personnel cotisait à l’occasion pour appuyer lesdits programmes. Il y avait aussi des dons de la communauté. Dans certains cas, le personnel et les élèves partageaient un repas lors de certaines activités : Action de grâces, Noël et repas traditionnels autochtones.

« Il faut d’abord gagner la confiance de l’élève, s’assurer qu’il a les besoins premiers, être bien nourri, avoir un lieu sécuritaire. » Michel Perron, mentor, Conseil scolaire catholique Franco-Nord.

Le personnel des écoles des conseils participants était aussi conscient des besoins vestimentaires de quelques élèves. Une ou deux fois par année, il pouvait y avoir un « échange de vêtements » auquel contribuaient les membres du personnel ainsi que les élèves.

Pour privilégier le sens d’appartenance et appuyer le bien-être des élèves, une salle était réservée pour elles et eux. Les élèves pouvaient s’y rendre au cours de la journée pour relaxer, étudier, manger ou consulter le babillard. Ce babillard affichait les activités et les fêtes autochtones. Cette salle pouvait à l’occasion accueillir des membres de la communauté autochtone, dont des aînées et des aînés.


L’approche en équipe

Dès le départ, les conseils et les écoles qui offraient le programme de mentorat ont misé sur l’approche en équipe. Les équipes variaient selon les besoins, soit l’identification des élèves qui pourraient bénéficier du programme, la détermination des besoins individuels des élèves et le genre d’appui qui pouvait répondre à ces besoins. Le mentor et l’équipe de la réussite de chaque école secondaire forment le noyau. S’ajoutent ensuite des enseignantes ou des enseignants titulaires ou de matière, des travailleuses sociales ou des travailleurs sociaux, ou autres personnes selon les besoins et le profil de chaque élève.

Les partenaires externes variaient aussi selon les élèves. Il y avait la communauté autochtone et les aînées et les aînés, des centres communautaires autochtones comme les Indigenous Friendship Centres et, parfois, d’autres organismes communautaires.


Les centres de formation, les collèges et universités francophones – appui dans les études postsecondaires

Le programme de mentorat visait à appuyer l’élève dans sa transition vers le monde du travail, un programme de formation ou un programme collégial ou universitaire.

Le mentor accompagnait donc les élèves dans leur transition. Parfois, il établissait la communication initiale. Dans certains cas, il accompagnait l’élève lors de la visite du collège ou de l’université.

Sans aucun doute, la poursuite d’études postsecondaires dans un collège ou une université, surtout si l’établissement est loin de la famille et de la communauté de l’élève, peut être stressante. Voilà pourquoi les collèges et les universités offrent un centre ou un portail pour les étudiantes et les étudiants autochtones. Ces centres appuient les élèves pendant leur inscription, les guident dans l’obtention de bourses, facilitent la rencontre avec des conseillères et des conseillers, offrent des programmes de tutorat, les appuient dans le processus d’auto-identification et leur permettent même de rencontrer une aînée ou un aîné pour découvrir leurs racines. Voici quelques-uns de ces centres et portails.


Les histoires à succès

La réussite au secondaire

Paul (nom fictif) était un jeune homme qui avait décroché et qui avait eu des problèmes avec la justice dans sa communauté d’origine. Il a donc déménagé à Kapuskasing pour s’éloigner de cette communauté. Lorsqu’il est arrivé, il avait 18 ans, mais, à cause de ses démêlés, il lui restait un peu plus de deux ans de scolarité pour décrocher son diplôme d’études secondaires. Le mentor Marc-André Dubosq et l’équipe-école l’ont pris sous leurs ailes.

« Il était souvent absent au début. Le défi, c’était de le convaincre de venir à l’école. Il travaillait beaucoup dans l’atelier avec moi dans les cours de technologie. Lorsqu’il venait, je ne le chicanais pas parce qu’il n’était pas venu depuis quelques jours. Je profitais du temps qu’il était là et souvent il demeurait après les heures d’école pour poursuivre ses projets. Il est donc venu à bout de mettre autant d’heures que les autres élèves. Après un certain temps, il a commencé à fréquenter l’école régulièrement. » Marc-André Dubosq, mentor, Conseil scolaire public du Nord-Est

Paul était un jeune homme très travaillant et très habile avec ses mains. Il s’est accroché aux cours de technologie et a bénéficié des cours d’éducation coopérative. Ces cours l’ont motivé à poursuivre ses études et, avec un certain appui, il a pu obtenir les crédits obligatoires dont il avait besoin pour recevoir son DÉSO.

« Parce qu’il se sentait bien à l’école, c’était plus facile pour lui de passer ses cours obligatoires. » Marc-André Dubosq, mentor, Conseil scolaire public du Nord-Est de l’Ontario.

Marc-André a travaillé avec le Centre de placement Apatisiwin. Grâce à ce partenariat et à ses habiletés, Paul a trouvé un emploi dans un domaine qui l’intéresse. Son placement pour ses cours d’éducation coopérative était donc rémunéré. Cela lui a aussi valu un emploi à temps complet durant l’été.

Paul a obtenu son diplôme l’année passée et travaille maintenant à temps plein dans le secteur minier pour l’un des plus grands employeurs de la région.

Lorsqu’il a reçu son diplôme, sa sœur a envoyé un courriel à tout le personnel de l’école afin de les remercier d’avoir permis à Paul d’obtenir son diplôme malgré son profil de décrocheur.


La transition vers la vie postsecondaire

Jean (nom fictif) vivait dans des conditions défavorables à la maison. Il cumulait trois emplois. La fatigue le gagnait et sa performance scolaire laissait à désirer. Pourtant, c’était un élève mordu et assez motivé. Le mentor, Michel Perron, cherchait des ressources financières et des bourses pour Jean qui se préparait à la vie postsecondaire. Le mentor a aussi organisé une visite sur place au collège avec Jean et d’autres élèves.

« À 17, 18 ans, sans l’appui de la famille, ramasser ses bottes et son baluchon et s’en aller au collège, tout seul et de rencontrer ça, ce monde-là quand tu viens d’une petite place, ce n’est pas évident. » Michel Perron, mentor, Conseil scolaire catholique Franco-Nord

Donc, pour éliminer cette anxiété et offrir une certaine sécurité, Michel a accompagné Jean et quelques autres élèves lors de leur visite au collège Boréal. Des rencontres et une tournée du collège ont été organisées.

« Voici où tu vas étudier, voici ce à quoi le local aura l’air et voici une personne qui est prête à t’aider. Tu peux l’appeler presque n’importe quand cette personne-là. » Michel Perron, mentor, Conseil scolaire catholique Franco-Nord

Une visite au Centre d’éducation autochtone Louis-Riel du Collège Boréal a été faite lors de la tournée. Deux conseillers ont rencontré les élèves. Ils ont parlé des services qu’ils offraient et des activités qui avaient lieu. Les conseillers ont traité des bourses disponibles et de la façon de remplir les demandes. Ils ont expliqué que le Centre agissait un peu comme un centre d’accueil. Les élèves peuvent entrer à toute heure et demander de l’aide et des consultations pour des services quelconques.

« Le rôle du mentor, c’est un peu un rôle de routeur, d’entremetteur. Il faut avoir des tentacules un peu partout et regarder le profil et ensuite dire : On prend cette main-là et cette main-là et on branche ça ensemble pour aider à faciliter la transition et l’obtention de service. » Michel Perron, mentor, Conseil scolaire catholique Franco-Nord

Michel s’est informé de Jean auprès du collège et on lui a dit qu’il allait très bien.



En bref

Le programme de mentorat pour la réussite des élèves autochtones est un projet pilote qui leur offre un mentor pour les accompagner jusqu’à l’obtention de leur diplôme d’études secondaires et qui facilitera leur accès au monde du travail, à un programme de formation ou aux études postsecondaires.

Le succès du programme est fondé sur l’appui des parents, du personnel de l’école, du conseil scolaire, des partenaires communautaires et des partenaires autochtones. C’est cependant le rapport de confiance entre le mentor et l’élève qui guide et assure la réussite de cette dernière ou de ce dernier. Enfin, ce projet de mentorat s’insère dans un plan global qui, on l’espère, permettra à l’élève de réussir sur tous les plans et de découvrir ses racines. Le Sommaire du Troisième rapport d’étape sur la mise en œuvre du Cadre d’élaboration des politiques de l’Ontario en éducation des Premières Nations, des Métis et des Inuit, Renforcer notre parcours d’apprentissage, nous rappelle que :

« L’estime de soi est essentielle au bien-être et à la réussite des élèves. Un milieu scolaire sécuritaire et accueillant, où les élèves peuvent développer un sens d’identité positif et être fiers d’eux-mêmes, est d’une grande importance pour améliorer l’estime de soi. […] Les parents et les familles autochtones ont reconnu que les occasions de mentorat des élèves, l’accès à des modèles et la transmission de connaissances traditionnelles et culturelles avaient une incidence positive sur l’estime de soi des élèves. »



Références bibliographiques

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